Depuis plus de 25 ans, la Banque Centrale Européenne a su se faire une place sur la scène internationale, et sa monnaie, l’euro, dans le quotidien des citoyens européens. Toutefois, il reste encore beaucoup à faire pour s’adapter aux évolutions à venir.
Bien que celle-ci conforte ses efforts sur la lutte contre l’inflation, elle entrevoit de nouveaux chantiers en l’environnement et aux liquidités bancaires.
Vers un dégonflement du bilan ?
Christine Lagarde, présidente de l'institution monétaire, a récemment déclaré le 4 mai que la Banque Centrale Européenne (BCE) ne rachèterait pas de nouveaux titres avec les fonds provenant du remboursement des obligations détenues dans le cadre de son portefeuille lié à l'Asset Purchase Programme (APP). Pour le moment, cette stratégie concerne uniquement 20 milliards d'euros par mois. À partir de juillet, ce montant mensuel devrait atteindre environ 30 milliards.
L'objectif est de réduire le bilan considérable de la Banque Centrale, qui a été multiplié par quatre depuis 2015, atteignant un pic de près de 9 000 milliards d'euros, grâce aux programmes massifs de soutien à l'économie. En cessant les réinvestissements, la BCE retirera des liquidités du système financier.
Depuis 2015, les États se sont habitués à pouvoir compter sur les achats de la banque centrale sur le marché secondaire, d'autant plus qu'ils avaient d'importantes sommes à placer. Ils devront donc trouver d'autres investisseurs pour remplacer l'institution de Francfort, qui seront peut-être plus attentifs aux différences entre les États.
La liquidité bancaire
Une autre préoccupation de la Banque Centrale concerne la liquidité bancaire. Le 28 juin approche et c’est l'une des plus importantes échéances de remboursement des TLTRO (Targeted Long Term Refinancing Operations), s'élevant à près de 500 milliards d'euros. Ces crédits à long terme (d'une durée de trois ans) sont accordés par la Banque Centrale aux établissements bancaires afin de les encourager à financer l'économie réelle. Ces TLTRO arriveront à échéance progressivement d'ici décembre 2024.
Bien que la fin de ce dispositif exceptionnel soit légitime dans le cadre de la lutte contre l'inflation, elle suscite des interrogations dans un contexte de faillites bancaires aux États-Unis et en Suisse. La BCE pourrait s'inspirer des TLTRO pour offrir à l'avenir des financements aux banques d'une durée supérieure à trois mois.
Lutte contre le réchauffement climatique
Lors de la révision stratégique de la BCE, qui s'est terminée en juillet 2021, l'un des objectifs fixés était de contribuer à la lutte contre le réchauffement climatique, une préoccupation particulièrement chère à la présidente de la BCE. Pour cela, il est prévu de verdir le portefeuille d'obligations lié à la politique monétaire.
Jusqu'à présent, cette transition s'effectuait lors des achats de dette effectués dans le cadre des réinvestissements de l'APP. Avec la fin de ces réinvestissements, la BCE devra trouver un autre moyen de soutenir le développement de financements pour la transition énergétique.
Objectif : lutte contre l’inflation
Cette revue stratégique a également conduit à une révision de la cible d’inflation de la Banque Centrale. Celle-ci reste fixée à 2 %, mais elle est désormais qualifiée de « symétrique » : la BCE pourrait aussi bien accepter une légère augmentation des prix que légèrement inférieure à son objectif.
Cependant, de plus en plus de spécialistes estiment que l'économie est maintenant entrée dans une nouvelle ère, où l'inflation sera durablement plus élevée. Cela est notamment dû au coût croissant des énergies vertes. La BCE devra-t-elle adapter sa cible à cette nouvelle réalité ? Une chose est sûre : elle devra d'abord démontrer sa capacité à ramener l'augmentation des prix autour de 2 % avant de modifier son objectif. Sa crédibilité est en jeu.